L’erreur de jeunesse d’Alex Boissonneault, ex-journaliste et animateur devenu candidat du PQ dans Arthabaska, a fait beaucoup jaser, au point d’occulter le comportement très discutable du chef du Parti conservateur du Québec, Éric Duhaime.
À 21 ans, en 2001, Alex Boissonneault a fait partie d’un groupe d’extrême gauche qui voulait ouvrir une brèche dans la clôture du Sommet des Amériques. Arrêté, il a passé 41 jours en détention préventive, a écopé de travaux communautaires et de six mois à purger en collectivité.
Ces gestes n’auraient pas dû être posés, reconnaît Alex Boissonneault, qui ne s’en est jamais caché. Il a obtenu son pardon en 2011. Le parcours de ce père de quatre enfants est depuis irréprochable.
Candidat de qualité
Animateur de l’émission la plus écoutée à Québec, à Radio-Canada, M. Boissonneault était très apprécié. C’est le genre de personne dont le Québec a besoin, qui a réfléchi non pas à ce que la politique pourrait lui apporter, mais plutôt à ce qu’il pourrait apporter à la politique, s’il quittait une carrière florissante.
Ses racines dans Arthabaska sont par ailleurs bien ancrées, contrairement à Éric Duhaime, qui s’y présente dans l’espoir d’entrer à l’Assemblée nationale.
Yves Charlebois, maire de Saint-Ferdinand et ex-journaliste judiciaire, connaît Alex Boissonneault depuis l’enfance: un bon gars, tout comme sa famille, des gens très bien, insiste-t-il.
Peu avant son arrestation, en 2001, ses parents s’inquiétaient de ses fréquentations à Montréal. «Je leur avais dit: ne vous inquiétez pas, il est jeune, il va changer», se souvient Yves Charlebois.
Effectivement, il a changé, au point de se définir aujourd’hui comme un candidat «de centre droite».
Dérapage de Duhaime
Mais là où l’histoire dérape, c’est lorsqu’Éric Duhaime, qui venait de faire l’apologie du gars sympathique la veille, est tombé dans l’enflure verbale.
Cet ancien animateur de radio, critiqué pour sa tendance à verser dans la démagogie, a notamment affirmé qu’il avait été condamné à de la prison, ce qui est faux, et a parlé de «son passé criminel».
Selon lui, on ne traiterait pas les ex-militants d’extrême gauche et d’extrême droite sur le même pied.
Pour David Morin, professeur à l’Université de Sherbrooke et titulaire de la Chaire de l’UNESCO en prévention de la radicalisation et de l’extrémisme violent, il est cependant loin d’être nouveau de voir des militants ou ex-militants plus radicaux postuler en politique.
On en voit d’ailleurs partout aux États-Unis, en France et chez nous, notamment au PCQ, «qui a présenté un certain nombre de candidats [en 2023] qui étaient passablement radicaux», rappelle l’expert.
Ligne à tracer
M. Morin signale d’ailleurs que «chez les radicaux, ce qu’on veut, c’est justement de l’engagement prosocial.»
La ligne à tracer, c’est plutôt de savoir quels gestes on condamne, dit-il, et il faut faire la part des choses.
Ce principe fait justement en sorte que la société pourra être moins favorable envers les militants d’extrême droite.
«Une partie du discours des radicaux de gauche porte sur les institutions ou l’extrême droite, alors que chez les radicaux de droite, on cible plutôt des groupes particuliers de la population, ce qui est plus difficile à pardonner», explique David Morin.
En ce qui concerne le «passé criminel», combien d’élus ne pourraient siéger parce qu’ils ont conduit avec les facultés affaiblies? «C’est aussi socialement dangereux», dit-il.
L’expert y voit une «conversation très intéressante, mais beaucoup plus complexe qu’il n’y paraît». D’où l’importance d’éviter les raccourcis intellectuels comme ceux auxquels aime se prêter Éric Duhaime.