Malgré le bannissement du mot-clic #SkinnyTok au début du mois, des vidéos prônant la maigreur extrême restent facilement accessibles sur la plateforme chinoise.
Au début du mois de juin, TikTok a banni les contenus reliés au mot-clic #SkinnyTok, largement utilisé en anglais et en français. Ces vidéos qui se comptaient par milliers regroupaient des recettes pour maigrir rapidement et des conseils dénoncés pour leur impact néfaste sur la santé mentale et physique des jeunes.
Selon la professeure associée à l’École des médias de l’Université du Québec à Montréal Laurence Grondin-Robillard, cette mesure s’avère peu efficace et n’a pas éliminé le contenu problématique, puisque celui-ci circule désormais sous d’autres mots-clés.
«J’ai fait la recherche avec d’autres termes comme “skinn tiktok” avec deux N et j’accédais à ce contenu. Le contenu n’a pas été retiré. Quelqu’un qui veut va le trouver aussi facilement que moi», observe la professeure, qui étudie les tendances sur TikTok.
Le hashtag #skinny, par exemple, toujours autorisé sur la plateforme, a été utilisé près de 600 000 fois. D’autres mots-clés émergent pour contourner les restrictions.
Dans un contexte de pressions croissantes dans plusieurs pays, TikTok a agi pour redorer son image face aux critiques, selon l’experte. «On ne se sait pas ce qui se passe avec TikTok aux États-Unis, il y a une commission sur TikTok en France, on veut bien paraître», souligne-t-elle.
Une créatrice prend la parole
Laetitia De Carufel, créatrice de contenu body positive originaire de Laval suivie par 1,8 million d’abonnés, dénonce la multiplication de ces vidéos toxiques.
«Je peux pas croire que ce genre de contenu est accessible aussi facilement. Moi, j’ai lutté contre des troubles alimentaires et je ne peux pas imaginer avoir eu accès à ce genre de vidéo plus jeune», déplore la créatrice de contenu, qui est aussi ambassadrice pour l’organisme ANEB Québec, qui soutient les personnes aux prises avec des troubles alimentaires.
«On te dit que, pour avoir un beau outfit, tu dois juste être mince. Je capote», illustre-t-elle.
Impact chez les jeunes
ANEB Québec, préoccupé par le contenu généré par la tendance #SkinnyTok, fait partie des groupes ayant interpellé Tik Tok il y a quelques mois.
L’organisme qui vient en aide aux personnes souffrant de troubles alimentaires observe une corrélation directe entre les réseaux sociaux et la détérioration de l’image corporelle chez les jeunes.
«C’est environ 80% des jeunes qui disent qu’ils sont influencés par les réseaux sociaux par rapport à leur alimentation et les comportements reliés», révèle la nutritionniste Lise-Andrée Massé, responsable de l’éducation chez ANEB.
Mme Massé considère néanmoins la mesure de TikTok comme un pas dans la bonne direction.
«C’est un message qu’on envoie en disant: c’est banni, ces comptes-là. Ça ne t’empêche pas de voir les vidéos, mais ça aide à comprendre qu’il y a quelque chose de pas normal», affirme-t-elle.