Le corridor du troisième lien longera le chemin des Îles à Lévis et aboutira sur l’autoroute Robert-Bourassa ou sur le boulevard Pierre-Bertrand, en pont-tunnel, ce qui est le «meilleur projet au meilleur coût», a tranché la ministre des Transports, Geneviève Guilbault; mais pour le tracé précis, les coûts, les données économiques et d’achalandage, il faudra encore attendre.
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Les questions étaient plus nombreuses que les réponses, jeudi, lors de la présentation du corridor choisi pour le troisième lien.
«C’est le meilleur corridor sur la base de l’ensemble des critères, mais je vais vous revenir cet automne pour le tracé», a lancé la ministre des Transports, Geneviève Guilbault.
Rejeté par la CDPQI
Le corridor choisi par le gouvernement de la CAQ avait été rejeté l’an dernier par la Caisse de dépôt et placement Infra (CDPQI), à la suite d’une analyse multicritères (voir encadré).
Il comporte des «défis», a convenu la ministre, mais il n’y a pas de solution «idéale» et son gouvernement tient à aller de l’avant avec ce projet.
Sans présenter de modélisation de circulation ou de chiffres d’achalandage de la future mégastructure, la ministre a assuré que c’est «une évidence» que les temps de parcours seront moindres.
Le troisième lien prend sa source sur l’autoroute 20, à Lévis, à la hauteur du chemin des Îles. Il passe «en tranchée» possiblement sur les terres de la ferme Chapais, que le fédéral et la Ville de Lévis veulent développer en quartier résidentiel.
Pont et tunnel
Il se transforme en pont à haubans de 2,8 km pour franchir le fleuve au-dessus des installations de Valero et à la hauteur de la marina de Sillery.
Dans le secteur du parc du Bois de Coulonge, il plonge ensuite dans le cap Diamant, qu’il franchit en tunnel jusqu’à une jonction avec le boulevard Charest. Les camions transportant des matières dangereuses ne pourront pas l’emprunter.
Ensuite, deux scénarios sont possibles pour parvenir à l’objectif d’un raccordement avec l’autoroute Félix-Leclerc : via l’autoroute Robert-Bourassa ou via le boulevard Pierre-Bertrand, par un «boulevard urbain». Dans les deux cas, il aboutit dans un secteur déjà bâti et doit franchir la rivière Saint-Charles, on ne sait pas encore comment.
Sur l’insertion dans les quartiers résidentiels, commerciaux ou industriels qu’il pourrait traverser, en tranchées ou en voies d’autoroutes, les médias ont posé plusieurs questions et obtenu peu de réponses. Même chose pour les expropriations qui seront nécessaires, les coûts, le gain de temps dans la circulation ou les analyses économiques sur lesquelles se base le choix du corridor.
Les villes ont été avisées du choix du corridor la veille de l’annonce. Le Port n’a pas été prévenu, mercredi, de son côté.
«Évidence»
Mme Guilbault a parlé à plusieurs reprises d’«une évidence». Elle a expliqué pourquoi le pont à l’est, pour lequel le premier ministre François Legault avait marqué sa préférence, a été rejeté. Elle a évoqué la longueur double de l’ouvrage du pont (5,8 km), ainsi que sa hauteur de 20 mètres plus haut, l’impact sur le paysage du Vieux-Québec, les contraintes environnementales, l’emprise sur le fleuve.
Le corridor central est «le plus optimal», a assuré Mme Guilbault. Il coûtera moins cher, malgré l’ajout d’une part en tunnel, qui peut être de 1,75 km à 3,6 km selon le scénario choisi sur la rive nord, assure-t-elle.
«Il s’agit du corridor permettant de réaliser le meilleur projet au meilleur coût», a insisté Mme Guilbault. Pressée d’avancer, parce que plusieurs citoyens et entreprises voient «l’urgence» d’un nouveau lien, dit-elle, la ministre a l’intention de proposer un tracé précis dans six mois, de lancer les appels de qualification pour un consortium en 2026, de signer le contrat en 2027 et de débuter les travaux en 2028.
Corridor rejeté par CDPQI
En juin 2024, CDPQI avait rejeté l’option que le gouvernement a choisie pour son troisième lien. Voici des extraits de son analyse multicritères:
– «Étant donné la grande complexité technique ainsi que les fortes difficultés d’insertion des deux côtés des berges.»
– «La réserve de capacité de l’A-40 à Québec impose une limite sur les débits véhiculaires.»
– «Rallonge les déplacements car le raccordement à l’A-40 à Québec éloigne les usagers des destinations principales, soit le secteur de Ste-Foy et la colline Parlementaire.»
– «Requiert une infrastructure très complexe ayant des ouvrages d’art de très grande portée, des tunnels et des tranchées couvertes.»
– «Raccordement aux boul. Charest, boulevard Pierre-Bertrand ou à l’A-440 très complexe.»
– «Contraintes physiques et environnementales importantes imposées par les berges du fleuve, les falaises et la voie navigable. Franchissement supplémentaire de la rivière Saint-Charles.»
– «L’origine du parcours à Lévis est moins attrayante car elle se situe en marge des zones de densités urbaines.»
Les questions sans réponses
Les coûts
Le tracé précis
Les gains de temps pour les automobilistes qui l’emprunteront
Le débit véhiculaire sur la future infrastructure
Les analyses économiques qui ont présidé au choix du corridor
Le nombre et l’ampleur des expropriations requises
Nombreux revirements sous la CAQ
Le projet de troisième lien a changé plusieurs fois depuis 2018. Voici un rappel chronologique de ses différentes moutures.
27 juin 2019 : Le ministre des Transports François Bonnardel annonce un tunnel autoroutier de 6,5 km, à l’est, sans préciser les coûts. Le tracé privilégié se situe alors entre l’A-40, du côté de Québec, et l’A-20, dans le secteur de la route Lallemand à Lévis et passerait sous la pointe ouest de l’île d’Orléans.
29 janvier 2020 : Le gouvernement Legault confirme qu’il privilégie le corridor de centre-ville à centre-ville, qui inclut le transport en commun. Il relierait l’A-20 près de la route Monseigneur-Bourget, à Lévis, à l’autoroute Laurentienne, près du Stade Canac, dans Saint-Roch.
17 mai 2021 : François Bonnardel annonce que le troisième lien de centre-ville à centre-ville sera un gigantesque monotube qui coûtera de 6 à 10 milliards $ à construire, sur 10 ans. Le diamètre du tunnel (19 m) implique la conception du plus gros tunnelier au monde.
14 avril 2022 : Le gouvernement Legault annonce son intention de réduire la facture de 25%, à 6,5 milliards $. La nouvelle mouture prévoit deux tubes de plus petit gabarit comprenant deux voies chacun, prévue pour 2032.
20 avril 2023 : La ministre des Transports, Geneviève Guilbault, annonce que le nouveau lien interrives en tunnel sera réservé exclusivement au transport collectif. C’est la fin du troisième lien routier, qui aurait coûté au moins 10 milliards $.
3 octobre 2022 : Au lendemain de la défaite de la CAQ dans l’élection partielle de Jean-Talon, le premier ministre Legault ressuscite l’idée d’un troisième lien et dit vouloir consulter la population.
13 juin 2024 : Malgré la conclusion de CDPQI, qui ne recommande pas la construction d’un troisième lien, le PM annonce qu’il va de l’avant avec un pont autoroutier dans l’est de la ville, sans transport collectif.
12 juin 2025 : Geneviève Guilbault présente un nouveau corridor central pour les voitures dans lequel pourrait circuler du transport collectif, entre le chemin des Îles et le secteur Lebourgneuf.